Psoriasis pustuleux : forme grave de dermatose psoriasique chronique
Aperçu
Le psoriasis pustuleux est une forme rare et grave de psoriasis, caractérisée par la présence de pustules stériles sur un fond érythémateux et inflammatoire. Il peut être localisé ou généralisé et est considéré par certaines écoles dermatologiques comme une entité distincte en raison de son comportement clinique, de son pronostic et de sa prise en charge particuliers. Comparé au psoriasis en plaques, le psoriasis pustuleux présente une évolution plus agressive et peut être associé à des symptômes systémiques et à des complications potentiellement mortelles. Cette affection implique une inflammation immunitaire exagérée et une hyperprolifération des kératinocytes, entraînant un dysfonctionnement épidermique et la formation de pustules. Elle peut toucher aussi bien les enfants que les adultes et peut apparaître de novo ou évoluer à partir d’un psoriasis vulgaire préexistant. Forme chronique touchant les paumes et la plante des pieds, avec pustules stériles douloureuses ;
Psoriasis pustuleux annulaire : Lésions en forme d’anneau avec pustules à la périphérie, généralement chez les enfants ou pendant la convalescence ;
Acrodermatite continue de Hallopeau : Touche les doigts distaux, entraînant une perte des ongles et une atteinte osseuse à long terme ;
Impétigo herpétiforme : Forme rare et potentiellement mortelle de psoriasis pustuleux survenant pendant la grossesse, associée à une hypocalcémie et à des risques pour le fœtus.
Étiologie et facteurs déclenchants
L’étiologie précise du psoriasis pustuleux reste incertaine. On pense qu’elle implique une dysrégulation immunitaire génétiquement prédisposée, souvent exacerbée par des facteurs déclenchants externes ou internes. Contrairement au psoriasis vulgaire, les associations connues avec le gène HLA-Cw6 sont moins importantes. Les facteurs déclenchants potentiels sont les suivants : Arrêt brutal de corticostéroïdes systémiques, d’antipaludiques, de bêta-bloquants, de lithium, d’AINS, de certains antibiotiques (pénicilline), de contraceptifs oraux ou de calcipotriol ;
Infections et maladies systémiques : Infections bactériennes ou virales, ou immunosuppression sous-jacente ;
Irritants physiques ou chimiques : Exposition à des produits chimiques, traumatismes, brûlures ou contact avec des substances fortement irritantes ;
Changements hormonaux : Grossesse ou ménopause ;
Stress psychologique ;
Tabagisme et exposition excessive aux UV ;
Psoriasis vulgaire préexistant : Peut évoluer vers une forme pustuleuse sous l’effet des facteurs de stress énumérés ci-dessus.
Présentation clinique
Le psoriasis pustuleux se manifeste par des pustules stériles superficielles qui peuvent être étendues ou localisées, souvent associées à de la fièvre, un malaise et une toxicité systémique dans les formes généralisées. Ces pustules contiennent un exsudat neutrophilique et ne sont pas infectieuses. Les signes cutanés comprennent : Pustules : vésicules surélevées, non folliculaires, remplies d’un liquide jaunâtre, apparaissant sur une peau rouge et enflammée ; Érythème environnant : plaques rouge vif, chaudes, enflées et exfoliatives autour et sous les pustules ; Plaques rouge vif, chaudes, enflées et exfoliatives autour et sous les pustules ;
Desquamation : Après la rupture des pustules, de larges plaques de peau peuvent se détacher ;
Localisation courante : Paumes et plantes des pieds (type localisé), membres, tronc (type généralisé) ;
Symptômes systémiques : Frissons, fatigue, arthralgie, fièvre, déshydratation dans les formes sévères ;
Infection bactérienne secondaire : Peut survenir si les pustules se rompent et que la barrière cutanée est compromise.
Évolution : Chronique avec poussées, ou exacerbations aiguës potentiellement mortelles nécessitant une hospitalisation. Sans intervention appropriée, les formes généralisées peuvent entraîner des complications graves et la mort.
Diagnostic
Le diagnostic du psoriasis pustuleux est principalement clinique et repose sur les antécédents et l’apparition de lésions pustuleuses sur une peau érythémateuse. La présence de plaques psoriasiques typiques et de symptômes systémiques confirme le diagnostic. Les étapes du diagnostic comprennent :
- Examen physique : identification des pustules stériles, répartition, symptômes systémiques et antécédents de psoriasis ;
- Triade d’Auspitz (dans certains cas) :
- Phénomène de la tache de stéarine : élimination facile des squames des plaques ;
- Membrane terminale : film rouge lisse sous les squames ;
- Saignement ponctuel : après grattage, de petites hémorragies ponctuelles apparaissent. L’histologie révèle des pustules spongiformes de Kogoj, une acanthose et des microabcès de Munro ;
- Culture du contenu des pustules : pour exclure une infection bactérienne ;
- Analyses sanguines : recherche d’une anémie, d’une élévation des marqueurs inflammatoires (VS, CRP), d’un déséquilibre électrolytique et d’une altération de la fonction hépatique/rénale.
Diagnostic différentiel
Le psoriasis pustuleux doit être différencié d’autres dermatoses pustuleuses et squameuses, notamment :
- Infections dermatophytiques : en particulier la teigne des mains et des pieds ;
- Eczéma dyshidrotique : Vésicules contenant un liquide clair, prurit, souvent bilatérales ;
- Kératodermie blennorrhagique : Observée dans l’arthrite réactive, touchant les paumes/plantes des pieds ;
- Impétigo et pyoderma : Infection bactérienne avec pustules purulentes ;
- Toxicodermie : Éruptions pustuleuses d’origine médicamenteuse ;
- Pustulose généralisée de la grossesse (impétigo herpétiforme) : Forme grave survenant pendant la grossesse.
Traitement
Le traitement vise à réduire la formation de pustules, l’inflammation et la prolifération des kératinocytes, et à prendre en charge les symptômes systémiques. Le traitement est individualisé en fonction de la gravité et des comorbidités.
Traitement topique :
- Agents kératolytiques : urée, acide salicylique pour réduire les squames et ramollir les plaques ;
- Corticostéroïdes topiques : agents de puissance moyenne à élevée pour réduire l’inflammation ;
- Inhibiteurs de la calcineurine : Tacrolimus pour les zones sensibles (hors AMM) ;
- Rétinoïdes topiques : dans certains cas (par exemple, tazarotène) ;
- Émollients : utilisés quotidiennement pour restaurer la fonction barrière et le confort.
Traitement systémique :
Indiqué dans les cas suivants :
- Psoriasis pustuleux généralisé ;
- Arthrite psoriasique ;
- Échec du traitement topique ou de la photothérapie.
- Rétinoïdes oraux : L’acitrétine est couramment utilisée, en particulier dans les variantes pustuleuses ;
- Immunosuppresseurs : Méthotrexate, cyclosporine dans les cas sévères ou réfractaires ;
- Agents biologiques : inhibiteurs du TNF-α (adalimumab), inhibiteurs de l’IL-17 (secukinumab), inhibiteurs de l’IL-12/23 (ustekinumab) et inhibiteurs de la PDE-4 (apremilast) ;
- Corticostéroïdes systémiques : généralement évités en raison du risque de rebond lors du sevrage, mais peuvent être utilisés dans des situations mettant la vie en danger sous surveillance ;
- Photothérapie : La thérapie UVB ou PUVA peut être utilisée en cas de maladie stable, mais est généralement évitée en cas de pustulose active.
Complications
Par rapport au psoriasis en plaques, le psoriasis pustuleux est associé à des complications plus graves et potentiellement mortelles, en particulier dans les formes généralisées :
- Infections secondaires (pyoderma) : provenant de pustules rompues ;
- Alopécie et onycholyse : perte de cheveux et destruction des ongles ;
- Troubles métaboliques : hypoalbuminémie, hypocalcémie ;
- Lésions organiques : Insuffisance rénale (due à une nécrose tubulaire aiguë), insuffisance hépatique en cas d’atteinte systémique ;
- Septicémie et défaillance multiviscérale : observées dans les cas pustuleux généralisés non traités ou fulminants ;
- Risque de mortalité : estimé à 2 % dans les cas graves non traités avec complications.
Prévention
Bien que le psoriasis pustuleux ne soit pas toujours évitable, la fréquence et la gravité des poussées peuvent être réduites par :
- Éviter les médicaments déclencheurs : Ne jamais arrêter brusquement les corticostéroïdes ; éviter l’automédication avec des AINS, des antibiotiques ou des médicaments hormonaux sans avis médical ;
- Gérer le stress : Soutien psychologique ou thérapie pour les poussées induites par le stress ;
- Maintenir la fonction barrière de la peau : Utilisation quotidienne de crèmes hydratantes, éviter les irritants ;
- Cesser de fumer et modérer sa consommation d’alcool ;
- Mode de vie sain : Alimentation équilibrée, activité physique régulière, prise en charge des comorbidités métaboliques (par exemple, diabète, obésité) ;
- Surveillance étroite : Suivi régulier par un dermatologue et évaluation en laboratoire pendant le traitement systémique.
Conclusion
Le psoriasis pustuleux est une maladie inflammatoire grave de la peau qui peut se manifester sous forme localisée ou généralisée. Elle nécessite un diagnostic précoce et une prise en charge agressive afin de prévenir les complications. Grâce aux progrès réalisés dans le domaine des traitements topiques, systémiques et biologiques, la plupart des patients peuvent obtenir un soulagement significatif des symptômes et un contrôle de la maladie. Les soins interdisciplinaires, l’éducation des patients et l’observance du traitement sont essentiels pour garantir le succès à long terme et améliorer la qualité de vie.